DYNAFAC
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Le 3 avril dernier a été publié sur le site ATIBT un article intitulé « Le puits de carbone des forêts tropicales s’affaiblit rapidement » relayant l’article Nature de Hubau W. & al « Asynchrononous carbon sink saturation in African and Amazonian tropical forest » et les publications du CIRAD et de l’Université Gembloux sur le sujet.

En complément de cet article, FRMi souhaite présenter ici son analyse des enseignements à tirer de la publication de Nature.
 
 
 

Nous souhaitons mettre l’accent sur le rôle des forêts dans la lutte contre les changements climatiques.

  • Il convient tout d’abord de rappeler le rôle primordial des forêts dans l’atténuation des changements climatiques. Les forêts naturelles sont considérées comme un « puits de carbone » : depuis leur apparition et grâce à la croissance des arbres, elles séquestrent du CO2, c’est-à-dire qu’elles absorbent le carbone atmosphérique et le fixent dans le bois. Tant que l’arbre est vivant, ce carbone reste séquestré. Lorsque l’arbre meurt (naturellement, ou par feu ou autre évènement de déforestation), le carbone est rejeté dans l’atmosphère.
  • Les forêts naturelles stockent donc le carbone avant tout de façon « statique » par « capitalisation » depuis l’apparition de la forêt, avec du carbone qui reste soustrait de l’atmosphère tant que la forêt est préservée. Ainsi, une forêt climacique, bien adaptée aux conditions environnementales, pourra être en équilibre, conservant un stock de carbone constant. Dans certains cas, un stockage additionnel de carbone s’ajoute chaque année : dans une phase dynamique, la croissance des arbres en forêt est supérieure à la mortalité naturelle, et les forêts continuent à soustraire chaque année du carbone atmosphérique.
  • Le stockage « statique » assuré par les forêts est primordial : en détruisant un hectare de forêt naturelle, ce sont plusieurs centaines de tonnes de CO2 qui sont émises dans l’atmosphère, il est donc essentiel de préserver les forêts naturelles existantes en les gérant durablement. Ce rôle est connu et n’est pas remis en cause dans l’article paru dans Nature. L’article de Hubau et al. traite du « rôle dynamique » des forêts dans la séquestration du carbone atmosphérique, en cherchant à répondre à la question suivante : est-ce que les forêts vont continuer à croître et à séquestrer du carbone atmosphérique supplémentaire dans les vingt prochaines années, et si oui à quel rythme et pendant combien de temps ?
  • L’article de Hubau et al. nous confirme en premier lieu que les forêts d’Afrique Centrale, stockent du carbone mais au-delà de cela, qu’elles en ont capté des quantités additionnelles importantes durant ces dernières décennies et qu’elles continueront à le faire encore jusqu’en 2039. On peut se réjouir de ce résultat, qui n’est pas nouveau, il était déjà obtenu par d’autres travaux de recherche et il confirme les enseignements des travaux d’aménagement que nous avons réalisés, qui montrent que les forêts d’Afrique Centrale sont en forte évolution.
  • Les forêts d’Afrique Centrale sont donc en phase de capitalisation, avec un accroissement important du carbone qu’elles stockent, de 0,66 t CO2/ha/an, soit environ 0,3%/an. Intuitivement, on se doute que cet accroissement ne va pas se poursuivre indéfiniment et que le stock de carbone en forêt va finir par tendre vers un maximum.
  • La publication de Hubau et al. confirme le ralentissement de la capacité d’absorption, avec à terme une « saturation » du stock de carbone.
  • La publication de Hubau et al. n’évoque pas le risque que les forêts d’Afrique Centrale deviennent émettrices de carbone.
  • En tout état de cause, les forêts d’Afrique Centrale stockent des quantités importantes de CO2 et continueront à le faire pendant des décennies au moins si elles sont bien gérées.

Ainsi, la publication de Nature renforce encore l’importance de bien gérer les forêts d’Afrique Centrale pour lutter contre les changements climatiques. En résumé, ce que nous retenons de la lecture de la publication de Nature : les forêts d’Afrique Centrale stockent des quantités importantes de carbone et ce stock continuera encore à s’accroître, même à un rythme plus lent, jusqu’en 2039. La préservation de ce stock par une bonne gestion des forêts d’Afrique Centrale est donc plus que jamais un bon moyen de lutte contre les changements climatiques.